Le courage
De manifestations en manifestations à Phnom-Penh, on ne parvienne plus à distingue l’indignation du révolte populaire. On a l’impression que le Parti du salut national khmer (PSNK), parti de l’opposition, travaille toujours persuadé qu’il suffit de donner du temps au temps et on sait que pendant ce temps le Parti populaire du Cambodge (PPC), parti au pouvoir, gagne à petit pas, mais surement, sur le terrain international et l’opinion des Khmers. A travers ses revendications, le PSNK reconnaît de facto le gouvernement royal, dirigé par Hun Sen, qu’il a accusé d’institution inconstitutionnelle. L’affaire de fraude électorale devient aujourd’hui une affaire banale, parce que les escrocs deviennent des acteurs incontournables dans la stratégie de négociation du PSNK.
Sam Rainsy et Kem Sokha continuent de persuader les électeurs trompés que la négociation avec le PPC ne serait pas une entente ou une soumission, parce que le PSNK maintient toujours sa position. Mais on le savait que cette position est obsolète, parce que le PPC ne veut point changer sa condition préalable : le PPC est le seul gagnant des élections du 28 juillet. La négociation complexe souhaitée par le PSNK qui se trouve aujourd’hui son impasse. Continuer donc d’en parler aujourd’hui serait de réduire l’élan du peuple khmer pour combattre la dictature et le régime inféodé au Vietnam et à la Chine communiste. Mais, vous, Sam Rainsy et Kem Sokha et les autres, quels sont vos mandants ? D’où tirez-vous cette légitimité dont vous faites un usage d’autant plus ostentatoire pour négocier avec des voleurs de la victoire électorale ?
Que faire ? Quand on se proclame Premier ministre élu, Sam Rainsy devrait, comme Hun Sen, former un gouvernement avec sa majorité absolue de 63 sièges à l’assemblée nationale. Ce serait à partir de cette formation du gouvernement dirigé par Sam Rainsy, on pourrait parler de la crise politique et le pose dans les milieux de chanceliers des pays étrangers au Cambodge : qui est le Premier ministre légitime ? Mais ce problème n’existe pas. Et Hun Sen continue de diriger le pays si les artères du pays ne gonflent pas du sang de l’ire du peuple, et l’apoplexie publique l’obligera à quitter le pouvoir. Mais si Sam Rainsy et Kem Sokha veulent élargir leur base démocratique, ils devraient créer « un Conseil National de la Transition(1) » avec les autres mouvements politiques qui se battent politiquement contre le régime actuel, dont la mission principale c’est de faire appliquer les accords de paix du 23 octobre 1991.
Le Cambodge a, aujourd’hui, le devoir de tirer les leçons du passé qui faisaient plonger le pays dans le chaos. Le courage en politique, c’est d’avoir le courage de changer ces aberrations. La contrition collective n’est pas une force populaire qui pourrait subvertir le courant de la décadence de la nation khmère, il faut donc faire une révolution, mais pas comme Pol Pot. Et ça tombe bien, parce que la majorité des Khmers ont envie de changer le régime actuel. Le peuple khmer d’aujourd’hui ne demande pas à Sam Rainsy et Kem Sokha une chance comme Napoléon Bonaparte exigeait de ses généraux dans les champs de bataille, mais il les réclame un courage et une méthode pour conduire cette révolution avec le peuple et pour le peuple. Ont-ils le courage de faire une véritable révolution qui toucherait à la matrice même du pays ? S’ils continuent de négocier avec Hun Sen, ce serait condamner à terme au statut de collaborateur. Quel absurde aveuglement !